Les 200 ans du retour de la Visitation à Annecy (1824-2024)
le monastère de la rue Royale
Un peu d'histoire...
Le 21 mars 1793, paraît un décret ordonnant l’expulsion des Visitandines d’Annecy et l’occupation du monastère par un régiment de la légion des Allobroges, composé de Savoyards favorables à la Révolution française. Pour la dernière fois, le 25 mars, l’office est entonné par la communauté des Visitandines dans le premier monastère de la Visitation.
L’église et le monastère de la Visitation sont confisqués aux religieuses. Elles s’enfuient et se réfugient notamment en Italie ou dans leurs familles en Savoie . Les Visitandines ne reverront jamais leur premier monastère.
Dans le cadre de la Révolution, tous les biens de la communauté, ainsi que leurs dépendances (terres, fermes, moulins…) sont vendus comme Biens nationaux à Jean Samuel Fazy, industriel genevois, pour la somme de 150 000 livres.
L’église saint François de Sales et le monastère attenant sont convertis en manufactures d’indiennes : ateliers industriels spécialisés dans l’impression sur tissus. A présent, des ouvriers en grand nombre investissent les lieux.
Le 15 juillet 1801, le concordat est signé à Paris. Le pape Pie VII le ratifie le 15 août 1801 et il est promulgué le 8 avril 1802. Ce texte décrète le rétablissement du culte catholique mettant fin aux années de la terreur révolutionnaire.
C’est à Claude-François de Thiollaz que l’on doit le rétablissement d’un monastère de la Visitation à Annecy. A partir de 1818, M. de Thiollaz, alors vicaire général du diocèse de Chambéry, commence à recevoir des offrandes pour relever la Visitation d’Annecy.
En 1821, C.-F. de Thiollaz tente de racheter l’ancien premier monastère de la Visitation. Mais cette tentative se révèle vaine, devant le prix élevé ; de plus, le monastère a été morcelé en lotissements et l’église, désaffectée, est méconnaissable.
Claude-François de Thiollaz achète à Thomas-Dominique Ruphy et François Marie-Joseph Dépolier, deux parcelles de terre qui sont alors situées hors de la ville, correspondant bien aux attentes de la vie contemplative des Visitandines. Ce terrain correspond aujourd’hui au quadrilatère formé par les rues Vaugelas, de la Gare, Royale et de la Poste.
Sur les plans de l’architecte Louis Ruphy, un plan est dressé et les fondations commencent à être creusées au printemps 1821.
Le 15 février 1822, un siège épiscopal est établi à Annecy. Le chanoine Claude-François de Thiollaz est nommé premier évêque. Sacré à Turin le 17 avril 1823, il entre solennellement le 6 juin à Annecy et assure de sa bienveillance cette construction.
En juillet 1824, le bâtiment est prêt à accueillir la communauté renaissante. Dans le même temps, monseigneur de Thiollaz rappelle les survivantes de la période révolutionnaire : il n’en reste que 8 en vie sur les 41 religieuses chassées en 1793, mais 4 sont infirmes et incapables de voyager. Sont alors de retour à Annecy : sœur Péronne-Rosalie de Thiollaz (sœur de l’évêque), sœur Anne-Sophie de Genève de Boringe, sœur Josèphe-Victoire Vallette, et l’archiviste sœur Thérèse-Françoise Brunet.
Le 22 juin 1822 marque le rétablissement de la communauté à Annecy, sous l’autorité de mère Josèphe-Victoire Vallette. Les sœurs annoncent cette restauration dans une circulaire à l’Ordre de la Visitation datée du 30 juin. La nouvelle Mère supérieure ne verra cependant jamais sa petite communauté entrer dans le nouveau monastère car elle tombe malade et décède le 25 novembre 1823. Contraint de déroger à son projet initial de n’appeler que des professes de l’ancien monastère, monseigneur de Thiollaz fait venir du Mans mère Magdeleine de Chantal Clanchy. Elle arrive le 24 juin 1824 avec trois autres sœurs.
Le 2 juillet (à cette époque, jour de la fête de la Visitation), les Visitandines font leur entrée solennelle. La communauté est alors composée de 9 professes, 1 tourière et 7 postulantes et s’installe dans le monastère même si la 4ème aile n’est pas terminée.
La construction de l’église attenante n’est alors pas commencée, par manque de fonds. Le roi Charles-Félix et la reine Marie-Christine de Bourbon y pallient et posent la première pierre, rue Royale, le 16 août 1824. La réalisation est terminée deux ans plus tard et les reliques sont transférées les 20 et 23 août 1826 depuis la cathédrale pour Saint François et depuis l’église saint Maurice pour Sainte Jeanne.
Le corps de François de Sales est placé dans une châsse offerte par la famille de Sales et celui de Jeanne de Chantal dans celle qui avait servi pour exposer le corps du saint évêque de Genève depuis la restauration du culte en 1806. En 1828, la Reine, dans un souci d’équité, offre une châsse pour faire pendant à celle de François de Sales.
Désormais en possession des reliques dont elles sont gardiennes, les Visitandines occupent le nouveau monastère et les Annéciens ont une nouvelle église. La Visitation d’Annecy est rétablie. Les Visitandines tirent leurs ressources d’un pensionnat « pour l’éducation chrétienne des futures mères de famille » qui fermera ses portes en 1884, rendant aux sœurs leur vie contemplative.
Suite à la Réunion de la Savoie à la France, en 1860, Napoléon III et l’impératrice Eugénie parcourent les nouveaux départements français : Savoie, Haute-Savoie et Nice. Arrivés le 29 août à Annecy, ils visitent le lendemain le couvent de la Visitation.
A la fin de l’année 1877, saint François de Sales est proclamé Docteur de l’Eglise. Les Visitandines qui souhaitent fêter dignement cet événement sont préoccupées par l’état de l’église du couvent. En effet, construite rapidement, elle menace désormais de s’écrouler. On fait appel à un architecte italien, le comte de la Vénerie, qui trace les plans de la nouvelle église dont l’ingénieur Despine suit les travaux. Le chantier, activement mené, permet au sanctuaire d’être prêt pour les fêtes du Doctorat en août 1878.
A la fin du XIXe siècle, le monastère se trouve cerné par des commerces, de nouvelles constructions et par la gare bâtie à proximité, avec l’arrivée du chemin de fer. En 1904, le maire Marius Ferrero entame des pourparlers avec les Visitandines pour récupérer le terrain. Des projets d’une urbanisation galopante et le souhait de construction d’un nouvel hôtel des postes contraignent les religieuses à rechercher un nouveau lieu pour leur tranquillité et leur recueillement.
Le 14 avril 1909, l’évêque d’Annecy, monseigneur Campistron, bénit la première pierre du nouveau monastère sur les flancs du Semnoz, dans un lieu tranquille et recueilli.
La page de l’histoire du monastère de la rue Royale se tourne définitivement le 2 août 1911 : les Visitandines le quittent et s’installent dans leur nouveau couvent. Le même jour a lieu la translation des reliques de Saint François de Sales et de Sainte Jeanne de Chantal.